Judith et Holopherne, ©Michel Charvet
Judith et Holopherne (Gouache)

… Comme beaucoup de militaires, le Général était un grand fêtard, qui ne s’en laissait pas compter question pinard. Il en abusait plus que de raison, au point d’être devenu un authentique pochetron. Aussi, lorsque Judith lui offrit l’outre de vin, au lieu de s’en délecter à le déguster à petites gorgées, le rustre la vida d’un trait. Judith commanda alors à sa servante d’aller chercher le cubitainer de réserve. Ce dernier, bien que de moindre qualité, fut aussi promptement éclusé. Sans être complètement « bourré », Holopherne n’en était pas moins quelque peu secoué. Constatant que l’affaire était bien engagée, Judith alla puiser dans ses réserves et lui ramena une infâme piquette, tout juste bonne à déboucher les toilettes…Il but ce poison et commença à perdre la raison. Complètement saoul, il tomba à genoux, et c’est à quatre pattes qu’il tenta de se saisir de son invitée, bien décidé à la « sauter ». De son coté, Judith prenait un malin plaisir à l’éviter et, tout en prenant des airs de vierge effarouchée, cherchait à le fatiguer. A ce petit jeu du chat et de la souris, Holopherne fut bien vite essoufflé et, c’est d’une voix saccadée,  à peine audible, qu’il lui dit :

 — Judith, je t’en prie, arrête ! Tu me fais perdre la tête.

Il ne croyait pas si bien dire, car la jeune femme releva alors sa robe et se saisit d’un cimeterre qu’elle avait dissimulé, accroché à sa jarretière, et, d’un coup précis, le col lui raccourcit. Elle remisa alors la tête du général dans un carton à chapeau et, le plus discrètement du monde, quitta le camp, emportant avec elle le précieux trophée, qu’elle comptait bien exposer au-dessus de sa cheminée.

Son retour à Bétulie fut triomphal, la foule exultait et l’on parlait déjà d’elle pour les prochaines élections municipales. Nullement grisée par ce succès, Judith la jouait profil bas, affirmant que seul Dieu avait armé son bras.

On fit alors venir Achior, le général moabite. Lorsque ce dernier vit la tête d’Holopherne, il se prosterna aux pieds de Judith et, comprenant enfin la puissance du Dieu d’Israël, demanda à se convertir et se faire circoncire.

Judith, qui était encore tout à son exploit, prit alors la chose en main et, d’un coup de cimeterre, fit tomber le sexe à terre.

— C’est peut-être coupé un peu court, s’excusa-t-elle.

— Ce n’est pas grave,  répondit Alchior : Avec l’aide de Dieu cela repoussera. 

— Surement, mais il faudra prier souvent,  précisa Judith, tout en lui posant un pansement.